Lettre à adresser à vos députés
Madame la Députée, Monsieur le Député,
Le 17 octobre, le gouvernement et la majorité parlementaire, se sont engagés en faveur de la modulation des allocations familiales. Cette mesure, va venir en débat devant l'Assemblée Nationale dans les séances du 21 au 24 octobre consacrées à l'examen du PLFSS (Projet de loi de financement de la sécurité sociale) pour 2015. Je souhaite porter à votre connaissance les arguments des familles réunies en associations au sein du réseau Familles de France.
En 2014, un plan d'économies sévères a déjà été mis en œuvre en matière de politique familiale. Le Président de la République avait alors arbitré entre deux possibilités: soit une réduction du plafond du quotient familial, soit l'atteinte au principe de l'universalité par la modulation du montant des allocations familiales selon les ressources de la famille.
Le Président de la République avait alors choisi une réduction importante du plafond du quotient familial qui devait rapporter plus d'un milliard d'euros. Ce choix correspondait à un message clair : un refus d'introduire un seuil de ressources dans le dispositif des allocations familiales jugé contraire au principe d'universalité.
C'est donc avec consternation que les familles voient ressurgir l'idée d'introduire un critère de ressources dans le dispositif des allocations familiales.
Conditionner les allocations aux ressources ouvrira une brèche et constituera une grave rupture historique dans les principes de solidarité qui fondent l'assurance sociale et notre Pacte républicain. Après les allocations familiales ce sera l'universalité de notre système d'assurance maladie, qui sera interrogé.
Avec les orientations prises aujourd'hui, il pourra être jugé normal que chaque assuré social bénéficie d'un remboursement de ses frais de santé en fonction de ses revenus.
La redistribution doit se faire par la voie de l'impôt et des cotisations et ne peut se faire par la voie de la mise sous conditions de ressources des allocations familiales. A ce titre, les classes dites aisées ou moyennes ont été plusieurs fois mises à contribution. Elles supportent de moins en moins de l'être.
Progressivement la légitimité des politiques s'en trouve évidemment affaiblie.
Classer les familles entre elles, c'est prendre de grands risques dans notre société de plus en plus segmentée.
Au delà de ces premiers arguments, montrant le risque de rajouter des menaces à la cohésion sociale de notre pays, les mesures proposées sont de plus, injustes:
- L'effort sera concentré sur les familles de 2 enfants et plus. Ce sont les familles nombreuses qui vont le plus souffrir.
- La perte en pouvoir d'achat s’avèrera importante pour certaines familles, jusqu’à 1000€ pour une famille de 2 enfants et jusqu’à 4000€ pour celle de 4 enfants.
- Le plafond de ressources pourra être abaissé facilement et deviendra une variable d'ajustement qui mettra en danger le système d'allocations, jusqu’à sa disparition.
- Le plafond de ressources créera des effets de seuil dissuasifs à l'égard du travail des mères (ou pères). Pourquoi travailler plus et augmenter les ressources du ménage si simultanément les allocations baissent.
- Cette mesure n’améliorera pas les conditions de vie des familles plus modestes.
Enfin, l'introduction des conditions de ressources dans le dispositif des allocations familiales augmentera le coût des charges de gestion, avec une révision des ressources chaque année. Elle pèsera sur le travail des CAF déjà surchargées. Elle est en contradiction totale avec les objectifs de simplifications voulus par le gouvernement.
Des solutions alternatives existent.
En dépenses, il faut prendre en compte les économies réalisées par la sous consommation des crédits prévus pour la création de places d'accueil de la petite enfance: 250 millions d'€ en 2013, 500 millions d'€ pour 2015 et la projection pour la durée de la COG (Convention d'objectifs et de gestion) montre que la sous consommation pourrait atteindre 1,4 milliard d'euros en 2017.
En recettes, la fiscalisation de la majoration de pension accordée aux parents de famille nombreuse décidée en 2013, devait revenir à la branche famille. Mais finalement, les gains de ces majorations ne lui sont pas affectés.
La lutte contre le travail non déclaré, sérieusement menée, pourrait permettre de récupérer des cotisations sociales pour un montant de 20 milliards d'euros, selon la cours des comptes, pour l'ensemble des branches de la sécurité sociale.
Pour toutes ses raisons, et connaissant votre attachement aux fondements de la politique familiale, qui a fait la preuve de son efficacité, je vous demande Madame la Députée, Monsieur le Député, de préserver l'intégrité du dispositif des allocations familiales.
Depuis 2012 les familles ont été mises à contribution à hauteur de 4 milliards d'euros. Comment redonner confiance aux familles si chaque année des décisions sont remises en cause, et si des restrictions viennent amputer les moyens mis à leur disposition.
Quel sera l'état de la politique familiale à la fin de cette mandature?
Les familles attendent votre réaction.
Je vous prie de recevoir, Madame la Députée, Monsieur le Député, l'expression de ma respectueuse considération.
Patrick CHRÉTIEN
Président National de Familles de France
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Président de .......
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