03.05.2016

Fiche N°85 - Harmonisation du droit du crédit au sein de l’UE

 L’objectif de l'ordonnance du 25 mars 2016, prise en vertu de de la loi n° 2014-1662 du 30 décembre 2014 portant diverses dispositions d'adaptation au droit de l'Union européenne, est de transposer la directive européenne n° 2014/17/UE du 4 février 2014. Son but est notamment d'harmoniser le droit du crédit au sein de l’UE.

Ne seront vues ici que les dispositions qui intéressent les consommateurs.

Le nouveau champ d’application du crédit immobilier aux consommateurs

Le régime du crédit immobilier s’applique :

1.Aux contrats de crédit destinés à financer les opérations suivantes (L313-1 du code de la consommation- nouvel article entrera en vigueur au 1er juillet 2016) 

Ø  Pour les immeubles à usage d'habitation :

-          leur acquisition en propriété ou la souscription ou l'achat de parts ou actions de sociétés donnant vocation à leur attribution en propriété, y compris lorsque ces opérations visent également à permettre la réalisation de travaux de réparation, d'amélioration ou d'entretien de l'immeuble ainsi acquis ;

-          leur acquisition en jouissance ou la souscription ou l'achat de parts ou actions de sociétés donnant vocation à leur attribution en jouissance, y compris lorsque ces opérations visent également à permettre la réalisation de travaux de réparation, d'amélioration ou d'entretien de l'immeuble ainsi acquis ;

-          les dépenses relatives à leur construction ;

Ø  L'achat de terrains destinés à la construction des immeubles à usage d’habitation.

 

2.Désormais à l’ensemble des crédits garantis par une hypothèque ou par une autre sûreté comparable sur les ensembles immobiliers à usage d'habitation ou par un droit lié à un bien immobilier à usage d'habitation. Ces contrats ainsi garantis sont notamment ceux destinés à financer, pour les immeubles à usage d'habitation ou à usage professionnel et d'habitation, les dépenses relatives à leur réparation, leur amélioration ou leur entretien.

La nouveauté issue de l’ordonnance est que seront désormais soumis au régime du crédit à la consommation les crédits en matière de travaux, même d’un montant supérieur à 75 000 € non garantis par une hypothèque, par une autre sûreté comparable sur les biens immobiliers à usage d'habitation ou par un droit lié à un bien immobilier à usage d'habitation.

Sont exclus du champ d’application du crédit immobilier (L313-2 du code de la consommation- nouvel article entrera en vigueur au 1er juillet 2016) :

  • les prêts consentis à des personnes morales de droit public ;
  • ceux destinés, sous quelque forme que ce soit, à financer une activité professionnelle, notamment celle des personnes physiques ou morales qui, à titre habituel, même accessoire à une autre activité, ou en vertu de leur objet social, procurent, sous quelque forme que ce soit, des immeubles ou fractions d'immeubles, bâtis ou non, achevés ou non, collectifs ou individuels, en propriété ou en jouissance ;
  • les opérations de crédit différé relatives aux entreprises de crédit différé lorsqu'elles ne sont pas associées à un crédit d'anticipation ;
  • les avances sur salaires ou des prêts de caractère exceptionnel consentis par des entreprises pour des motifs d'ordre social à leurs salariés ;
  • les opérations de crédit qui ne sont assorties d'aucun intérêt ni d'aucun frais autres que les frais couvrant les coûts liés à la garantie du crédit ;
  • les opérations consenties sous la forme d'une autorisation de découvert remboursable dans un délai d'un mois ;
  • les contrats qui sont l'expression d'un accord intervenu devant une juridiction ;
  • les contrats résultant d'un plan conventionnel de redressement conclu devant la commission de surendettement des particuliers ;
  • les contrats de crédit conclus à l'occasion d'un délai de paiement accordé, sans frais, pour le règlement d'une dette existante qui ne sont pas garantis par une hypothèque ou une sûreté réelle comparable ;
  • et le prêt viager hypothécaire.

Nouveauté : diffusion des informations générales

Un nouvel article L 313-6 sera inséré dans le code de la consommation : le prêteur est tenu d'assurer la disponibilité permanente des informations générales, claires et compréhensibles, sur les contrats de crédit immobilier. L'intermédiaire de crédit doit assurer également la disponibilité permanente des mêmes informations.

Ces dernières sont délivrées sur papier, sur tout autre support durable ou sous forme électronique. Elles doivent être facilement accessibles et fournies gratuitement à l'emprunteur.

Un décret en Conseil d'État déterminera la liste et le contenu de ces informations générales.

Cette nouvelle obligation n’entrera en vigueur qu’à partir du 1er octobre 2016.

Devoir d’explication et mise en garde (futur article L 313-11 code de la consommation-entrée en vigueur le 1er octobre 2016)

Le prêteur ou l'intermédiaire de crédit doit fournir gratuitement à l'emprunteur les explications adéquates lui permettant de déterminer si le contrat de crédit proposé et les éventuels services accessoires sont adaptés à ses besoins et à sa situation financière.

Ces explications comprennent notamment :

  • les informations contenues dans la fiche d’information standardisée européenne(FISE);
  • les principales caractéristiques du crédit et services accessoires proposés ;
  • les effets spécifiques que le crédit et services accessoires proposés peuvent avoir sur l'emprunteur, y compris les conséquences d'un défaut de paiement de l'emprunteur, notamment en cas de réalisation des garanties. Lorsque la garantie est constituée par un cautionnement accordé par un organisme de cautionnement professionnel, le prêteur informe l'emprunteur de la nature, des bénéficiaires et des conditions dans lesquelles celle-ci peut être actionnée et des conséquences pour l'emprunteur ;
  • s'agissant des éventuels services accessoires liés au contrat de crédit, l'indication de la possibilité ou non de résilier chaque composante séparément et les implications d'une telle procédure pour l'emprunteur.

Sans préjudice de l'examen de solvabilité, le prêteur est tenu de mettre en garde gratuitement l'emprunteur lorsque, compte tenu de sa situation financière, un crédit peut induire des risques spécifiques pour lui.

Service de conseil

Le prêteur pourra dorénavant fournir à l'emprunteur un « service de conseil » en matière de crédit qui consiste en la fourniture à l'emprunteur de recommandations personnalisées en ce qui concerne un contrat de crédit et constitue une activité distincte de l'octroi de crédit et de l'activité d'intermédiation (futur article L313-13 code de la consommation).

Cette recommandation personnalisée adaptée aux besoins et à la situation financière de l'emprunteur sur la base de la prise en considération :

  • par les prêteurs ainsi que les intermédiaires, lorsque ceux-ci agissent en vertu d'un mandat délivré par un prêteur, d'un nombre suffisamment important de contrats de crédit de leur gamme de produits ;
  • par les intermédiaires, lorsque ceux-ci agissent en vertu d'un mandat délivré par un client, d'un nombre suffisamment important de contrats de crédit disponibles sur le marché.

Les conditions de la fourniture du service de conseil seront précisées par décret en Conseil d'État.

Conseil d’indépendant

Le conseil est qualifié d'indépendant dès lors qu'il est rendu à partir d'un nombre suffisamment important de contrats de crédit disponibles sur le marché et que sa fourniture ne donne lieu à aucune rémunération autre que celle versée, le cas échéant, par le consommateur.

Le service de conseil indépendant ne peut en aucun cas donner lieu à une rémunération, sous quelque forme que ce soit, de la part d'un prêteur ou d'un intermédiaire de crédit.

Le prêteur ou l'intermédiaire de crédit qui fournit un service de conseil indépendant peut se prévaloir de l'appellation de conseiller indépendant.

Les conditions de la fourniture du service de conseil indépendant seront précisées par décret en Conseil d'État.

Évaluation de solvabilité de l'emprunteur

Le crédit ne doit être accordé à l'emprunteur que si le prêteur a pu vérifier que les obligations découlant du contrat de crédit seront vraisemblablement respectées conformément à ce qui est prévu par ce contrat.

À cette fin, le prêteur doit procéder à une évaluation rigoureuse de la solvabilité de l'emprunteur.

Cette évaluation prend en compte de manière appropriée les facteurs pertinents permettant d'apprécier la capacité de l'emprunteur à remplir ses obligations.

Le prêteur s'appuie dans ce cadre sur les informations nécessaires, suffisantes et proportionnées relatives aux revenus et dépenses de l'emprunteur, ainsi que sur d'autres critères économiques et financiers.

Ces informations sont recueillies par le prêteur auprès de sources internes ou externes pertinentes, y compris de l'emprunteur et comprennent notamment les informations fournies, le cas échéant, par l'intermédiaire de crédit au cours de la procédure de demande de crédit.

L'emprunteur est informé par le prêteur, au stade précontractuel, de manière claire et simple, des informations nécessaires à la conduite de l'évaluation de solvabilité et les délais dans lesquels celles-ci doivent lui être fournies.

Les informations sont contrôlées de façon appropriée, en se référant notamment à des documents vérifiables.

Le prêteur consulte également le fichier national des informations sur les incidents de paiement caractérisés.

À l'issue de la vérification de la solvabilité, le prêteur informe, dans les meilleurs délais, l'emprunteur du rejet, le cas échéant, de sa demande de crédit.

Lorsque cette décision est fondée sur le résultat de la consultation du fichier mentionné ci-dessus, le prêteur en informe l'emprunteur. Il lui communique ce résultat ainsi que les renseignements issus de cette consultation.

Le prêteur ne peut ni résilier, ni modifier ultérieurement le contrat de crédit conclu avec l'emprunteur au motif que les informations fournies étaient incomplètes ou qu'il a vérifié la solvabilité de manière incorrecte, sauf dans l'hypothèse où il est avéré que des informations essentielles à la conclusion du contrat ont été sciemment dissimulées ou falsifiées par l'emprunteur.

Le prêteur réévalue la solvabilité de l'emprunteur, sur la base d'informations mises à jour, avant qu'une augmentation significative du montant total du crédit ne soit accordée après la conclusion du contrat de crédit, à moins que ce crédit supplémentaire n'ait été prévu et intégré dans l'évaluation initiale de la solvabilité.

Les modalités d'application de l'évaluation de la solvabilité de l'emprunteur seront précisées par décret en Conseil d'État.

Offre de prêt

Le prêteur formule par écrit une offre adressée gratuitement sur papier ou sur un autre support durable à l'emprunteur ainsi qu'aux cautions déclarées par l'emprunteur lorsqu'il s'agit de personnes physiques.

Cette offre est accompagnée de la FISE lorsque ses caractéristiques sont différentes des informations contenues dans la fiche d'information fournie précédemment le cas échéant.

L'acceptation de l'emprunteur doit être donnée par lettre, le cachet de l'opérateur postal faisant foi, ou selon tout autre moyen convenu entre les parties de nature à rendre certaine la date de l'acceptation par l'emprunteur.

Prêts à taux variable

Pour les prêts dont le taux d'intérêt est variable ou révisable, le prêteur est tenu, une fois par an, de porter à la connaissance de l'emprunteur le montant du capital restant à rembourser.

En cas de modification du taux débiteur, l'emprunteur en est informé par écrit ou sur un autre support durable, avant que la modification n'entre en vigueur. Cette information indique le montant des échéances après l'entrée en vigueur du nouveau taux débiteur ainsi que, le cas échéant, toute modification du nombre ou de la périodicité des échéances.

Lorsque la modification du taux débiteur résulte d'une variation du taux de référence, que le nouveau taux de référence est rendu public par des moyens appropriés et que l'information relative au nouveau taux de référence est également disponible dans les locaux du prêteur, les parties peuvent convenir dans le contrat de crédit que cette information est communiquée périodiquement à l'emprunteur avec le montant des nouveaux paiements périodiques.

Lorsque le contrat de crédit est un crédit à taux variable ou révisable, le prêteur veille à utiliser un indice ou taux de référence clair, accessible, objectif et vérifiable. Il conserve des archives des indices utilisés pour calculer les taux débiteurs.

Remboursement anticipé

 Le prêteur communique gratuitement sans tarder à l'emprunteur, après réception de la demande de remboursement par anticipation, sur support papier ou sur un autre support durable, les informations nécessaires à l'examen de cette faculté. Ces informations chiffrent au moins les conséquences qui s'imposeront à l'emprunteur s'il s'acquitte de ses obligations avant l'expiration du contrat de crédit et formule clairement les hypothèses utilisées.