UNE RÉVOLUTION TRÈS POSITIVE SI L’ON SAIT S’EN SERVIR
Je suis né en 1956, la télévision n’était pas à la
maison mais il y avait la télévision chez une dame qui acceptait de nous recevoir, nous les jeunes du quartier, les jeudis après-midi, pour voir Zorro et deux dessins animés signés Walt Disney. C’était notre premier contact, avec la petite boîte à images !
Quelques années après, c’étaient les rassemblements autour d’une télé permettant de voir en couleur les matches de l’équipe de France de Rugby du tournoi des cinq Nations. Nous vibrions et nous étions de véritables supporters, pas des téléspectateurs…
De la faim de télé à la fin de la télé ?
Aujourd’hui, les enfants ne regardent presque plus la télévision, sont connectés en permanence et suivent leurs séries préférées en streaming, sans avoir à regarder le sacro-saint programme de télé qui ne sert plus
qu’aux vieux parents !
La télévision est dans presque toutes les maisons, mais il y a par personne un téléphone et un ordinateur connectés avec la Wifi familiale. Nous sommes dans une nouvelle ère, l’ère de la connexion permanente ou, tout simplement, de la culture numérique.
Les nouveaux Gutenberg
C’est un événement qu’il faut rapprocher de faits et dates comme l’apparition de l’écriture, l’invention de l’imprimerie ou la réalisation de la première photographie.
C’est un bouleversement total de la vie des individus, une évolution de la structure d’une société et de ses modes de relations entre citoyens. La famille, immergée dans ces changements, se trouve, elle aussi, dans une période instable, les différentes strates générationnelles n’étant pas systématiquement inculturées dans le même « bain ». Aujourd’hui, on peut avoir des grands-parents avec la télévision, les parents avec l’ordinateur, les enfants avec la tablette multimédia… Des outils différents pour une culture et des usages parfois antinomiques…
Si vivre au moment des premiers écrits de l’imprimerie ne fut pas simple, il faut reconnaître que la nouveauté a pris son temps pour atteindre l’ensemble de la population.
En 1450, on a l’utilisation pour la première fois d’une presse dite « Gutenberg » et il faut attendre 1875 pour voir la République se donner comme objectif d’apprendre à tous les citoyens à lire et écrire. Quatre siècles !
De nos jours, on n’a plus le temps d’apprendre à chacun l’utilisation d’une machine qu’elle est déjà obsolète. Une version technologique de la maxime révolutionnaire « du passé faisons table rase ! » !
Exemple ? Il y a cinq ans, un système de communication fait fureur, MSN. Tous les jeunes collégiens ne parlent plus que de ça et nombreux sont les parents qui s’interrogent…
Aujourd’hui, MSN est relégué au rôle de pièce de musée ! Maintenant c’est facebook et twitter qui ont pris la place et on commence à voir d’autres systèmes de communication tenter de bousculer les tenants pour obtenir une place au soleil, une part de marché. Encore du fric ! Nouvelle culture numérique, à voir ! Internet, indispensable !
On peut parler d’une véritable culture car ce mode de vie touche à tous les domaines et cela devient réellement incontournable comme le passage à l’écrit changea tout dans la société, chez les intellectuels du quinzième siècle.
On ne peut plus chercher un travail, suivre ses études, bénéficier d’aides diverses sans passer par Internet… Internet est incontournable ! On peut même parler d’une véritable fracture numérique : il y a ceux qui sont connectés et ceux qui ne le sont pas encore !
Parfois, ce manque de connexion crée des souffrances auprès des jeunes privés de connexion temporairement lors de vacances, d’un voyage, d’une panne technique, d’une destruction intempestive de terminal numérique…
La liberté absolue oui, mais pas pour abîmer des jeunes :
la violence et la pornographie qui viole l’intimité, n’éduquent pas.
Elles tuent l’imaginaire et déforment l’amour.
Des addictions fréquentes chez les jeunes mal informés et exploités !
On peut avoir peur et cette culture donne le tournis, et plonge l’observateur dans une interrogation angoissante : recherche de la connexion permanente, besoin d’images violentes ou pornographiques, confusion virtuel/réel, désinformation, besoin de la gratuité totale, recherche de la liberté absolue en faisant tous la même chose en même temps, façon d’exposer son intimité sans s’en rendre compte, besoin de picorer en passant de site en site sans prendre le temps d’approfondir, quel que soit le domaine, loisir ou profession, utilisation de réseaux sociaux tout en les critiquant, communication par texto… C’est tout cela qui transforme un individu en acteur numérique parfois exploité et mis en danger !
Moins de télé et Internet de nécessité ?
Le risque numérique est dans le fait que l’acteur a des parents qui, eux, sont d’une autre génération, la génération télévision. Cette situation peut faire naître des quiproquos,
incompréhensions et tensions intergénérationnelles, surtout quand le jeune devient accro à son ordinateur… nouveau doudou !
Banalisé la sphère ludique
Un autre risque identifié est d’avoir banalisé la sphère ludique en la rendant surdimensionnée. Les jeux vidéo, leur développement en ligne, la multiplicité des sites de loisirs en ligne, la mise en place d’ordinateurs connectés partout y compris dans les salles de repos en entreprises,
dans les bars et lieux publics, ont rendu le fait de jouer d’une grande simplicité. Regardez dans un bureau et vous verrez le cadre, la secrétaire ou le technicien jouer (solitaire, spider, dame de pique, démineur). Ce temps
de jeu devient de plus en plus conséquent mais doit être analysé avec précaution. Critiquer un jeune qui joue 3h par jour ne peut pas être fait par celui qui regarde la télévision 3h par jour (et les Français passent en moyenne 3h47 devant leur télévision par jour).
C’est le temps total passé devant les écrans qu’il faut prendre en compte si on veut comprendre les difficultés au coeur des familles (perte du dialogue et du temps passé ensemble) ou pour chaque individu (difficulté d’attention, mal à la tête, yeux rouges, troubles du sommeil).
Il faut s’approprier cette culture numérique pour en faire un instrument au service de l’homme et non transformer l’être humain en serviteur docile de cette culture.
Le dialogue dans la famille avec la priorité
au plus petit !
D’une façon simple et concrète, il faut dans une famille déterminer des espaces privés et communs, sauvegarder des temps de rencontres conviviaux comme les repas, installer les ordinateurs et consoles de jeux dans les espaces de passage ou communs pour éviter l’isolement, le repli sur soi.
Moins d’interdits, plus de dialogues !
Si autrefois on demandait au jeune d’obéir, souvent sans explication, aujourd’hui, il ne s’agit plus de le faire obéir, il est indispensable de lui expliquer, parfois à plusieurs reprises et il est bon que père et mère tiennent le même
discours avec des arguments complémentaires.